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Jean Swiatek, une fin de parcours mémorable.
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Fier d’être français

Certes, ce n’est rien comparé à la bataille des Ardennes, qui fait rage plus à l’Est, depuis quelques jours… Mais comme jouer est la priorité du moment, c’est parti pour quatre-vingt-dix minutes inoubliables ! Synonymes de victoire, aussi, même si l’instant paraît anecdotique eu égard à la cruauté de la période. Mais ce sont les Bleus qui déroulent le tapis de la victoire, en scorant trois fois ! Simonyi, à la limite du hors-jeu, bénéficie d’une passe décisive d’Arnaudeau pour ouvrir la marque (38e minute). Et quatre minutes plus tard, celui qui est depuis mars 1942 le premier joueur des Girondins de Bordeaux à avoir été international français conclut, par une reprise, un centre de Hiltl (42e). Avec deux buts d’avance à la pause, sans en avoir encaissé, Swiatek tient son bonheur de pied ferme… Aston, aggrave le score d’un tir consécutif à un mauvais renvoi (79e), imité par François De Wael, peu après (83e). 3-1, la victoire est belle et l’instant aussi, pour le Bordelais. « J’avais les larmes aux yeux lorsque j’ai entendu la Marseillaise, se souvenait-il en 2009, pour Aqui.fr. Je me sentais fier d’être français. C’était un grand honneur, je ne m’attendais pas du tout être sélectionné. »  

Matthews annihilé !

Cinq mois plus tard, lorsque la guerre est officiellement terminée et remportée par les Alliés, sa deuxième sélection a valeur de symbole, puisque l’Équipe de France se déplace en Angleterre, pour y affronter la sélection des Trois Lions. C’est le 26 mai 1945, à Wembley (Londres), en amical. Swiatek est titulaire et arrache, avec les siens, le nul in extremis. Soit après avoir été mené deux fois, puis égalisé à la 90e minute… Mais le fait du match, pour lui qui avait pour mission, comme ses trois compères de ligne arrière, de pratiquer un marquage individuel, c’est de l’avoir fait sur… Stanley Matthews ! Attaquant aussi doué que fascinant, celui qui sera notamment international de 1934 à 1957 (52 sélections et 11 buts), puis Ballon d’Or en 1956, fait Compagnon de l’Ordre de l’Empire britannique en 1957, et qui restera comme l’un des meilleurs joueurs de foot de l’histoire, est particulièrement ciblé par Barreau. Swiatek raconte : « C’était un vrai artiste du ballon. L’entraîneur m’avait tout de même prévenu de ne pas regarder ses pieds, mais le ballon ! J’ai suivi les consignes et réussi à annihiler Matthews… Je me rappelle que je ne pouvais même pas rentrer dans le bus après le match, tellement mes coéquipiers s’étaient jetés sur moi pour me féliciter ! » (Source Aqui.fr) Effectivement, les 60 000 spectateurs présents ne verront pas Matthews marquer… ni les Anglais gagner ! Un colosse aux pieds agiles En 1947, le colosse aux pieds agiles honore deux sélections supplémentaires, toujours en amical et toujours titulaire au poste. Ce sera face au Portugal, à Colombes, le 23 mars (devant près de 58 000 spectateurs), où il l’emporte 1-0 (avec René Gallice en « réserve »), puis à Londres (Highbury) face à l’Angleterre, le 3 mai (devant près de 55 000 spectateurs), où il s’incline 3-0. Mais sans Stanley Matthews… Enfin, lors de sa cinquième et ultime sélection, il boucle la boucle – encore titulaire – face à la Belgique, à Bruxelles (Stade du Heysel), en amical, le 4 juin 1950, et à quelques jours seulement de disputer la demi-finale, puis la finale de la Coupe Latine, avec les Girondins. Ce sera au prix d’une cinglante défaite 4-1 (devant 45 000 spectateurs), mais aux côtés de ses copains de club que sont Ben M’Barek Mustapha et Édouard Kargulewicz, unique buteur des Bleus.   Ainsi se clôt son aventure tricolore, non sans fierté, toutefois. Car s’il n’a pu – à l’image de ce qu’a aussi connu René Gallice –, en raison du conflit mondial et de la reconstruction qui s’est imposée par la suite, bénéficier d’un palmarès et d’un nombre de matches plus étoffés, il a savouré ces opportunités sportives comme il se devait et, probablement, plus encore. « J’ai eu 11 sélections en Équipe de France, mais 5 seulement sont comptabilisées ; celles où je n’étais pas que remplaçant », déclarait-il à Sud Ouest, en 2006. « À une époque où chacun jouait à sa manière, j’avais la volonté de progresser. À la fin de l’entraînement, je continuais à m’entraîner. J’avais aussi le désir de prouver que je travaillais. Je remercie le football pour ce qu’il m’a donné et m’a fait devenir aujourd’hui. Je ressens toujours une certaine fierté pour le parcours accompli, du fait de mes origines polonaises, et de la vie difficile que ma famille avait connue. Et je suis fier d’avoir pu porter ces maillots pendant dix ans et six ans. » Lui, le métronome des lignes-arrières françaises et bordelaises, spécialiste du jeu de tête, de l’interception et de la relance, meneur d’hommes et gentleman dans la vie comme sur les pelouses, n’a connu qu’un seul club professionnel dans sa carrière, et qu’une sélection nationale. Lui, Jean Swiatek, qui est décédé le 17 mai 2017, à l’âge de 95 ans, et qui regardait toujours les Bleus à la télévision, était l’un des doyens des internationaux français.